GUERRE CHINE-JAPON 1937-1945

GUERRE CHINE-JAPON 1937-1945

CRIMES DE GUERRE 1e PARTIE

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Civils chinois enterrés vivants.

Les crimes de guerre du Japon Shōwa désignent les crimes de guerre qui ont été commis par les Japonais au cours de la période de l’impérialisme japonais, à partir de la fin du XIXe siècle jusqu’en 1945, principalement durant la première partie de l'ère Shōwa. D’autres termes, tels que l’Holocauste asiatique ou les Atrocités de guerre japonaises, sont également utilisés pour désigner cette période.

Les historiens et les gouvernements de nombreux pays ont considéré officiellement les militaires de l’Empire du Japon, à savoir l’Armée impériale japonaise et la Marine impériale japonaise, comme les responsables des tueries et autres crimes commis à l’encontre de plusieurs millions de civils ou de prisonniers de guerre (PG) au cours de la première moitié du XXe siècle.

Définition

Au sens large, les crimes de guerre peuvent être définis comme un comportement dénué de scrupules dont un gouvernement ou des militaires font preuve à l'égard de civils ou de combattants d’un pays ennemi. Des militaires appartenant à l’Empire japonais ont été accusés ou convaincus d’avoir perpétré de tels actes au cours de la période de l’impérialisme japonais qui s’étend de la fin du XIXe siècle jusqu’au milieu du XXe siècle. Ils ont été accusés d’avoir commis une série de violations des droits de l’homme à l’encontre de civils ou de prisonniers de guerre (PG) en Extrême-Orient et dans l’Ouest du Pacifique. Ces événements ont atteint leur paroxysme au cours de la seconde guerre sino-japonaise de 1937-1945 et des campagnes asiatiques et du Pacifique de la Guerre de la Grande Asie orientale (1941-45).

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A Xuzhou, en Chine, 1938. Un fossé plein de corps de civils chinois tués par des soldats japonais.

Droit international et japonais

Bien que l’empire japonais n’ait pas signé les Conventions de Genève, qui sont depuis 1864 à la base des définitions communément admises des crimes de guerres, les crimes perpétrés tombent sous d’autres aspects du droit international et du droit japonais. Par exemple, de nombreux crimes commis par des Japonais étaient en contravention avec le code militaire japonais et ne furent pas portés devant des cours martiales comme le requiert ce code. L’empire viola également des accords internationaux signés par le Japon, en ce compris le traité de Versailles, tels que le bannissement de l’utilisation d’armes chimiques, et les Conventions de la Haye (1899 et 1907) sur la protection des prisonniers de guerre (PG). Le gouvernement japonais signa également le Pacte Briand-Kellog (1929), rendant ainsi ses actions susceptibles d’être poursuivies en tant que crimes contre la paix, une prévention qui avait été établie au cours des procès de Tokyo en vue de poursuivre les criminels de guerre de Classe A. Les criminels de guerre de "Classe B" étaient ceux qui furent convaincus de crimes de guerre dans leur acception habituelle, et ceux de Classe C étaient ceux qui étaient coupables de crimes contre l’humanité. Le gouvernement japonais avait également accepté les termes de la Déclaration de Potsdam (1945) après la fin de la guerre. Cette déclaration mentionnait à son article 10 deux types de crimes de guerre : l’un était la violation du droit international, tel que les mauvais traitements des prisonniers de guerre; l’autre était le fait de faire opposition "aux tendances démocratiques au sein du peuple japonais" et aux libertés civiles au Japon.

Au Japon, le terme crimes de guerre japonais ne vise généralement que les cas dont a eu à connaître le Tribunal militaire international pour l'Extrême-Orient, également connu sous le nom de procès de Tokyo qui ont suivi la fin de la guerre du Pacifique. Toutefois, le tribunal ne poursuivit pas les accusations de crimes de guerre imputées à des officiers de second rang ou à des militaires moins expérimentés. Ceux-ci furent traités séparément dans d’autres villes réparties dans la région Asie-Pacifique.

La loi japonaise ne définit pas les personnes condamnées dans les procès d’après-guerre comme des criminels en dépit du fait que les gouvernements japonais ont accepté les arrêts rendus au terme de ces procès ainsi que les conséquences du traité de San Francisco (1952). Ceci est imputable au fait que le traité ne fait pas état de la légalité du tribunal. Si le Japon avait accepté par le traité de San Francisco les arrêts des tribunaux ayant eu à connaître des crimes de guerre, ces arrêts auraient pu donner lieu à appel et être renversés par des tribunaux japonais, ce qui aurait été inacceptable pour le monde diplomatique international. De nos jours, les juristes japonais partagent sur la situation juridique du tribunal de Tokyo un consensus aux termes duquel l’exécution ou l’incarcération d’une personne suite aux procès d’après guerre est valide, mais n’a aucun rapport avec le code pénal japonais.

Époque et lieux

En dehors du Japon, des sociétés différentes utilisent des périodes de référence distinctes pour les crimes de guerre japonais. Ainsi, l’annexion de la Corée par le Japon en 1910 fut suivie par l’abolition des libertés civiles et l’exploitation du peuple coréen. Pour cette raison, certains Coréens utilisent l’expression crimes de guerre japonais pour les événements survenus directement durant la période de 1910 à 1945.

En comparaison, les Alliés de l’Ouest n’entrèrent pas en conflit avec le Japon avant 1941 de sorte que les Nord-Américains, les Australiens et les Européens peuvent considérer que les crimes de guerres japonais visent des événements qui se sont produits entre 1941 et 1945.

Les crimes de guerre japonais n’ont pas toujours été le fait des seuls Japonais. Dans chaque pays asiatique ou du Pacifique envahi ou occupé par le Japon, il s’est trouvé de petites minorités pour collaborer avec l’armée japonaise ou même y servir, pour des raisons diverses telles que des difficultés économiques, la coercition ou l’antipathie pour des puissances impérialistes concurrentes.

On a dit que les actes commis à l’encontre de peuples reconnus internationalement comme soumis à la souveraineté japonaise ne peuvent être considérés comme des crimes de guerre. La souveraineté japonaise de jure antérieure à 1945 sur des pays comme la Corée ou Formose était reconnue par des accords internationaux tels que le traité de Shimonoseki (1895) et le traité d’annexion entre le Japon et la Corée (1910). Toutefois, la légalité de ces traités est mise en question, les populations locales ne furent pas consultées, il y eut une résistance armée aux invasions et occupations japonaises et des crimes de guerre peuvent également être commis au cours de guerres civiles.

Culture militariste japonaise et impérialisme

La culture militariste, en particulier au cours de la période d’impérialisme japonais a eu une grande influence sur la conduite des militaires japonais avant et pendant la Seconde Guerre mondiale.

Au cours des siècles précédents, on avait enseigné aux samouraïs de ne pas remettre en question l’obéissance dont ils étaient redevables envers leurs suzerains, ainsi que de ne pas montrer la peur au combat. Après la restauration Meiji et l’effondrement du shogunat Tokugawa, l’Empereur devint l’objet de la loyauté militaire. Au cours de l’âge dit Âge de l’Empire à la fin du XIXe siècle, le Japon, à la suite des autres puissances mondiales, se construisit un empire en poursuivant cet objectif de façon agressive.

Comme c’est le cas des autres puissances impériales, la culture japonaise évolua de plus en plus vers un nationalisme chauvin depuis la fin du XIXe siècle jusqu’au siècle suivant. L’émergence du nationalisme japonais est due en partie à l’adoption du shintoïsme comme religion d'État et à son incorporation dans l’enseignement. Le shintoïsme considérait que l’Empereur était d’essence divine parce qu’il était réputé être le descendant de la déesse du soleil Amaterasu. Ceci permettait de justifier l’exigence d’une obéissance inconditionnelle à l’empereur et à ses représentants.

La victoire obtenue par le Japon dans la première guerre sino-japonaise (1894-1895) marquait son accession au rang de puissance mondiale. À la différence des autres puissances majeures, le Japon ne signa pas la convention de Genève – qui stipule qu’il convient de réserver un traitement humain aux PGs – avant la fin de la seconde guerre mondiale. Néanmoins, le traitement des prisonniers par les militaires japonais au cours de la guerre russo-japonaise (1904-1905) ou de la Première Guerre mondiale (1914-1918) était comparable à celui que réservaient les autres armées à leurs prisonniers.

Les événements des années 1930 et 1940

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L'Empereur Hirohito chevauchant Sirayuki lors d'une inspection militaire en août 1938

A la fin des années 1930, l’émergence du militarisme au Japon créa des similitudes au moins superficielles entre la culture militaire japonaise au sens large et celle des militaires d’élite de l’Allemagne nazie, comme les Waffen-SS. Le Japon disposait également d’une police secrète militaire, dénommée Kempeitai, qui ressemblait à la Gestapo nazie pour le rôle qu’elle joua dans les pays annexés ou occupés.

Comme dans les dictatures européennes, la brutalité irrationnelle, la haine et la peur devinrent banales dans les territoires occupés par le Japon. Des erreurs perçues comme des échecs ou une dévotion insuffisante à la personne de l’empereur se voyaient sanctionnées de châtiments souvent de nature physique. Dans l’armée, les officiers agressaient et battaient les hommes sous leur commandement. Ces derniers, à leur tour, en faisaient de même sur les échelons inférieurs de la hiérarchie. Dans les camps de PGs, ceci avait pour conséquence que les prisonniers, situés tout en bas de l'échelle, étaient en butte aux plus mauvais traitements.

La sévérité du Bushido couplée à l’ethnocentrisme du Japon dans sa phase impérialiste moderne résultait souvent en des brutalités à l’égard des civils et des PGs. Après le début d’une campagne militaire à grande échelle contre la Chine en 1937, des cas de meurtres, de torture et de viols commis par des soldats japonais semblent avoir été délibérément oubliés par leurs officiers et sont généralement restés impunis. De tels comportements se sont répétés tout au long de la guerre du Pacifique.

Les crimes

En raison du grand degré de souffrance causé par l’armée japonaise au cours des années 1930 et 40, elle est souvent comparée à l’armée du troisième Reich au cours de la période 1933-1945. L’historien Chalmers Johnson a écrit que:

Etablir lequel des deux agresseurs de l’Axe, l’Allemagne ou le Japon, fut au cours de la seconde guerre mondiale le plus brutal à l’égard des peuples qu’ils martyrisèrent est dénué de sens. Les Allemands ont tué six millions de Juifs et 20 millions de Russes (c à d de citoyens soviétiques); les Japonais ont massacré pas moins de 30 millions de Philippins, Malais, Vietnamiens, Cambodgiens, Indonésiens et Birmans, dont au moins 23 millions étaient ethniquement chinois. Ces deux pays ont pillé les pays qu’ils ont conquis à une échelle monumentale, encore que le Japon a volé plus, et sur une plus longue période, que les Nazis. Les deux conquérants ont réduit en esclavage des millions de personnes et les ont exploités comme main d’œuvre forcée et, dans le cas des Japonais, comme prostituées (de force) pour les troupes du front. Si vous étiez un prisonnier de guerre Nazi aux mains du Royaume-Uni, des États-Unis, de l’Australie, de la Nouvelle-Zélande ou du Canada (mais pas de la Russie), vos chances de ne pas survivre à la guerre s’élevaient à 4%; en comparaison, le taux de mortalité pour les prisonniers de guerre aux mains des Japonais approchait les 30%.

Meurtres de masse

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Cadavres d'une femme et de ses enfants tués par la marine impériale japonaise lors de la bataille de Manille en février 1945

Selon R. J. Rummel, professeur de sciences politiques à l’Université de Hawaii, entre 1937 et 1945, les Japonais ont «tué entre 3 000 000 et 10 000 000 de personnes, vraisemblablement 6 000 000 de Chinois, d’Indonésiens, de Coréens, de Philippins et d’Indochinois entre autres, y compris des prisonniers de guerre occidentaux. Ce démocide était dû à une stratégie politique et militaire en faillite morale, à une opportunité et des habitudes militaires ainsi qu’à la culture militaire.Rummel soutient que, pour la seule Chine, les conséquences directes de l’invasion furent qu’entre 1937 et 1945 approximativement 3,9 millions de Chinois, essentiellement des civils, furent directement exterminés par les politiques du régime shôwa et 10,2 millions civils périrent des causes indirectes liés à l'invasion.

L’incident le plus connu de cette période est celui du massacre de Nankin survenu en 1937-38 lorsque, selon les investigations du Tribunal militaire international pour l'Extrême-Orient, l’armée japonaise a massacré 260 000 civils et prisonniers de guerre. Herbert Bix, citant les travaux de Mitsuyoshi Himeta et Akira Fujiwara estime que la Politique des Trois Tout tue tout, brule tout, pille tout), une stratégie de la terre brûlée utilisée par l'armée impériale japonaise en Chine entre 1942 et 1945 et approuvée par Hirohito lui-même, fut responsable de la mort de 2,7 millions de civils Chinois Parmi les crimes de guerre commis en Chine on peut citer le massacre de Chiangjiao, dans le Hunan : entre le 9 et le 12 mai 1943, plus de 30 000 civils furent massacrés par un corps expéditionnaire japonais dirigé par le général Shunroku Hata.

Expériences sur des êtres humains et guerre bactériologique

Des unités militaires japonaises spéciales ont mené des expériences sur des civils et des PGs en Chine. Une des plus tristement célèbres était l’Unité 731. Ses victimes furent l’objet de vivisections sans anesthésie, d’amputations et furent utilisées pour tester les armes biologiques entre autres expériences. Il n’était pas fait usage de moyens anesthésiants car on considérait que cela pouvait altérer les résultats des expériences. Certaines victimes se virent injecter du sang d’origine animale.

Pour mettre au point un traitement des engelures, des prisonniers étaient mis à l’extérieur dans de l’eau glacée et forcés de laisser leurs bras exposés au froid. Leurs bras étaient alors régulièrement arrosés d’eau jusqu’à ce qu’ils soient complètement gelés. Le bras était ensuite amputé. Le médecin répétait le procédé depuis le bas du bras de la victime jusqu’à son épaule. Une fois les deux bras complètement amputés, les médecins faisaient de même avec les jambes jusqu’à ce qu’il ne reste qu’une tête et un torse. La victime était alors utilisée pour des expériences portant sur la peste et d’autres agents pathogènes.

Selon Global Security.org, les expériences réalisées par la seule Unité 731 sont responsables de 3 000 décès. En outre, «des dizaines de milliers, peut-être même 200 000 Chinois moururent de peste bubonique, du choléra, de l’anthrax et d’autres maladies résultant de la guerre biologique.

Un des cas les plus connus d’expérimentation sur des êtres humains survint au Japon lui-même. Au moins neuf des douze membres d’un équipage appartenant à l’U.S. Air Force survécurent au crash de leur bombardier B-29 à Kyushu le 5 mai 1945. Le pilote du bombardier fut envoyé à Tokyo en vue d’être interrogé tandis que les autres survivants étaient dépêchés au département d’anatomie de l’université de Kyushu à Fukuoka où ils furent l’objet de vivisection et/ou tués. Le 11 mars 1948, trente personnes, dont plusieurs médecins comparurent devant un tribunal allié ayant à connaître des crimes de guerre. Les charges relatives au cannibalisme furent abandonnées, mais 23 personnes furent déclarées coupables de vivisection et d’amputations non justifiées. Cinq d’entre elles furent condamnées à mort, cinq autres à la prison à perpétuité, et les autres à des peines d’emprisonnement de plus courte durée. En 1950, le gouverneur militaire du Japon, le général Douglas MacArthur, commua toutes les peines de mort et réduisit significativement la plupart des peines de prison. Tous ceux qui avaient été convaincus de vivisection dans le cadre de l’université étaient libres en 1958.

En 2006, l’ancien officier médecin de la Marine impériale japonaise, Akira Makino déclara qu’on lui avait donné l’ordre comme partie de son entraînement de pratiquer des vivisections sur environ 30 prisonniers civils aux Philippines entre décembre 1944 et février 1945. La chirurgie qu’il eut à pratiquer incluait des amputations et les victimes comprenaient des femmes et des enfants.

Utilisation d’armes chimiques

Selon les historiens Yoshiaki Yoshimi, Kentaro Awaya, Seiya Matsuno et Yuki Tanaka, l’empereur Shōwa autorisa par des ordres spécifiques (rinsanmei) l’utilisation d’armes chimiques en Chine. Par exemple, au cours de l’invasion de Wuhan d’août à octobre 1938, l’empereur autorisa l’utilisation de gaz toxiques à 375 reprises nonobstant l’article 171 du traité de Versailles, l'article V du Traité relatif à l'emploi des sous-marins et des gaz asphyxiants en temps de guerre et une résolution adoptée par la Société des Nations le 14 mai condamnant l’utilisation de gaz toxiques par le Japon.

Selon des documents retrouvés en 2004 par Yoshimi et Yuki Tanaka dans les archives nationales australiennes, des gaz toxiques furent testés sur des prisonniers australiens et néerlandais en novembre 1944 aux îles Kai.

Famines évitables

Les décès causés par le détournement des ressources disponibles au profit des militaires japonais dans les pays occupés sont également considérés comme des crimes de guerre par de nombreuses personnes. Dans l’Asie du Sud particulièrement au Vietnam et dans l’Est des Indes néerlandaises (Indonésie), qui comptaient au nombre des grands producteurs de riz – des millions de civils périrent en raison d’une famine évitable en 1944-1945 (voir par exemple l’article sur la Famine de 1945 au Viêt Nam).

Tortures de prisonniers de guerre

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Exécution du sergent Leonard G. Siffleet à Aitape en Nouvelle-Guinée le 24 octobre 1943

On rapporte également que les forces armées impériales japonaises ont largement utilisé la torture contre leurs prisonniers, habituellement pour obtenir rapidement des informations relevant de l'intelligence militaire. Les prisonniers torturés étaient souvent exécutés par la suite. Un ancien officier de l’armée japonaise qui servit en Chine, Uno Sintaro, a déclaré :

L’un des moyens essentiels d’obtenir des informations était l’interrogatoire des prisonniers. La torture était une nécessité inévitable.

Tuer les victimes et les enterrer en est une suite naturelle. Vous le faites parce que vous ne souhaitez pas que cela soit découvert. J’ai cru et j’ai agi de cette façon parce que j’étais convaincu de ce que je faisais. Nous faisions notre devoir comme on nous l’avait inculqué. Nous l’avons fait pour le salut de notre pays. En raison de nos obligations filiales vis-à-vis de nos ancêtres. Sur le champ de bataille, nous n’avons jamais considéré que les Chinois fussent des êtres humains. Lorsque vous êtes le vainqueur, les perdants semblent vraiment misérables. Nous avons conclu que l’ethnie Yamato (càd japonaise) était supérieure.

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Hong Sa Ik assis lors de son procès

Après la guerre, 148 Japonais furent convaincus de crimes de guerre par les tribunaux alliés. Le plus élevé en grade était le lieutenant-général Hong Sa Ik qui fut responsable de l’organisation des camps de prisonniers en Asie du Sud-Est.

Cannibalismes

De nombreux rapports écrits et témoignages rassemblés par la section australienne pour les crimes de guerre du tribunal de Tokyo, examinés par le procureur William Webb (futur juge en chef), montrent que des Japonais ont commis dans plusieurs parties de l’Asie ou du Pacifique des actes de cannibalisme contre des prisonniers de guerre alliés ou des populations civiles. Dans certains cas, ces actes furent le résultat de l’accroissement des attaques alliées sur les lignes de ravitaillement japonaises et des décès et des maladies frappant les soldats japonais en raison de la famine qui s’ensuivit. Toutefois, selon l’historien Yuki Tanaka, le cannibalisme était souvent une activité systématique menée par des compagnies entières agissant sous le commandement d’officiers.

Ces actions étaient fréquemment liées au meurtre. Par exemple, un prisonnier de guerre indien, le Havildar Changdi Ram témoigna que le 12 novembre 1944 le Kempeitai décapita un pilote allié.

Je vis la scène de derrière un arbre et observai certains des Japonais découper la chair de ses bras, de ses jambes, de ses hanches et de ses fesses et la ramener à leurs quartiers. Ils la coupèrent en petits morceaux et la firent frire.

Dans certains cas, la chair était prélevée sur des personnes en vie : un autre PG indien, le Lance Naik Hatam Ali (qui devait plus tard devenir citoyen pakistanais) témoigna qu’en Nouvelle-Guinée :

Les Japonais commencèrent à sélectionner les prisonniers et chaque jour un prisonnier était tué et mangé par les soldats. J’ai vu cela personnellement et près de 100 prisonniers furent tués et mangés par les soldats à cet endroit. Ceux d’entre nous qui restaient furent emmenés à un autre endroit situé à 80 km où dix prisonniers moururent de maladie. À cet endroit, les Japonais recommencèrent à sélectionner des prisonniers en vue de les manger. Ceux qui étaient sélectionnés étaient amenés dans une hutte où leur chair était prélevée sur leurs corps alors qu’ils étaient encore en vie. Ils étaient ensuite jetés dans un fossé où ils finissaient par mourir.

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Le lieutenant Général Yoshio Tachibana de l'Armée impériale japonaise se prépare à signé les documents de la reddition de son armée d'occupation.

L'un des officiers connus le plus élevé en grade à avoir été convaincu de cannibalisme fut le Lt. Général Yoshio Tachibana  qui, avec onze autres soldats japonais fut jugé pour l’exécution d’aviateurs de l’U.S. Navy et le cannibalisme perpétré sur au moins un d’entre eux en août 1944 sur l’île de Chichi Jima dans les îles Bonin. Ils furent décapités sur les ordres de Tachibana. Comme les lois militaires et internationales ne contenaient pas de dispositions spécifiques au cannibalisme, ils furent jugés pour meurtre et refus d'une sépulture honorable. Tachibana fut condamné à mort.

Travail forcé

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Prisonniers australiens et hollandais au camp de Tarsau en Thaïlande en 1943.

Le travail forcé imposé par les forces armées japonaises à des civils asiatiques et des prisonniers de guerre fut aussi la cause d’un grand nombre de morts. Selon une étude conjointe de plusieurs historiens dont Zhifen Ju, Mitsuyoshi Himeta, Toru Kibo et Mark Peattie, plus de dix millions de civils chinois furent mobilisés par la Kôa-in (agence de développement de l’Asie orientale) pour le travail forcé. Plus de 100 000 civils et PG moururent au cours de la construction du chemin de fer Birmanie-Siam.

La bibliothèque du Congrès estime qu’à Java, entre quatre et dix millions de romusha (en japonais, travailleurs manuels) furent forcés à travailler par les militaires japonais. Près de 270 000 de ces travailleurs javanais furent envoyés vers d’autres régions du Sud-est asiatique tenues par les Japonais. Seuls 52 000 furent finalement rapatriés à Java, ce qui laisse entendre que le taux de mortalité fut de 80 %.

Selon l’historien Akira Fujiwara, l’empereur Hirohito ratifia personnellement la décision de ne plus tenir compte des contraintes du droit international (conventions de La Haye) pour le traitement des prisonniers de guerre chinois dans une directive du 5 août 1937. Le même document précisait également aux officiers d’état-major qu’il n’y avait plus lieu d’utiliser le terme prisonnier de guerre.

D'autre part, la convention de Genève exemptait les PG ayant grade de sergent ou plus de travail manuel et stipulait que les prisonniers soumis à un travail devaient recevoir des rations supplémentaires ainsi que d’autres denrées de première nécessité. Mais à l’époque, le Japon n’était pas signataire de la Convention de Genève et les forces japonaises ne l’appliquèrent pas.

Femmes de réconfort

Le terme femme de réconfort ou femme de réconfort militaire était un euphémisme désignant les prostituées dans les bordels militaires japonais établis dans les pays occupés, donnant par la suite lieu à des accusations d’esclavage sexuel. Le nombre de femmes qui devinrent femmes de confort par la contrainte est sujet à discussion. Certaines sources prétendent que virtuellement toutes les femmes de confort avaient consenti à devenir prostituées et/ou étaient payées, mais d’autres ont fait état de recherches démontrant un lien entre l’armée japonaise et le recrutement forcé de femmes locales.

 En 1992, l’historien Yoshiaki Yoshimi a publié des documents basés sur ses recherches dans les archives de l’Institut national pour les études de la défense. Il affirmait qu’il existait un lien direct entre les institutions impériales telles que le Kôa-in et les établissements de réconfort. Lorsque les découvertes de Yoshimi furent publiées dans les médias japonais le 12 janvier 1993, elles firent sensation et forcèrent le gouvernement, représenté par le secrétaire du chef de cabinet, Kato Koichi, à reconnaître certains de ces faits le jour même. Le 17 janvier, au cours d’un voyage en Corée, le Premier Ministre Kiichi Miyazawa présentait des excuses formelles pour les souffrances endurées par les victimes. Les 6 juillet et 4 août, le gouvernement japonais publiait deux déclarations dans lesquelles il reconnaissait que « des établissements de réconfort furent mis en place en réponse à la demande militaire de l’époque, l’armée japonaise était, directement ou indirectement, impliquée dans la mise en place et la gestion des établissements de réconfort et le transfert des femmes de réconfort et que les femmes furent dans de nombreux cas recrutées contre leur volonté moyennant duperie ou coercition .

Il existe plusieurs théories sur la ventilation des femmes de réconfort par pays d’origine. Alors que selon certaines sources, la majorité de ces femmes seraient en fait d’origine japonaise, d’autres, dont Yoshini, font valoir que pas moins de 200 000 femmes, essentiellement d’origine coréenne ou chinoise, et en provenance d’autres pays comme les Philippines, Taiwan, la Birmanie, les Pays-Bas, l’Australie et les Indes néerlandaises, furent forcées de se livrer à la prostitution.

Les estimations sur le nombre des femmes de réconfort au cours de la guerre sont corroborées par le témoignage de celles qui ont survécu.

En mars 2007, une déclaration du Premier Ministre japonais, Shinzo Abe a relancé une polémique internationale à ce sujet. Abe avait notamment déclaré qu'il n'y avait eu aucun esclavage imposé par les forces armées japonaises et avait mis en doute l'utilité des déclarations gouvernementales de 1993. Une kyrielle d'anciennes victimes ont manifesté leur indignation suite à ces commentaires, dont la Coréenne Yong-soo.

Pillage

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Le Général Tomoyuki Yamashita (second à droite) fut responsable de la dissimulation du produit du pillage connu sous le nom de l'or de Yamashita. Il fut jugé à Manille entre le 29 octobre et le 7 décembre 1945, par une commission militaire étatsunienne sur la base d'accusations relatives au massacre de Manille et à d'autres faits antérieurs à Singapour. Il fut condamné à mort. Ce cas créa un précédent concernant la responsabilité des officiers commandants pour les crimes de guerre et est connu sous le nom de précédent Yamashita. La légitimité de ce jugement hâtif a été mise en question.

Les procès de Tokyo

Qui furent menés par les puissances alliées déclarèrent coupables de crimes de guerre de nombreuses personnes, notamment les anciens premiers ministres (jamais élus) Koki Hirota, Hideki Tōjō et Kuniaki Koiso. De nombreux chefs militaires furent également déclarés coupables. Deux personnes convaincues d’être des criminels de guerre de classe A jouèrent un rôle dans des gouvernements japonais d’après-guerre. Mamoru Shigemitsu fut ministre des affaires étrangères tant durant la guerre que dans le gouvernement Hatoyama de l’après-guerre et Okinori Kaya fut ministre des finances pendant la guerre et devint ministre des finances dans le gouvernement de Hayato Ikeda. Ils n’avaient toutefois pas de lien direct avec les crimes de guerre commis par les forces armées japonaises et aucun gouvernement étranger ne souleva d’objection lorsqu’ils entrèrent en fonction.

L'empereur Showa et tous les membres de la famille impériale impliqués dans la guerre comme le prince Yasuhito Chichibu, le prince Yasuhiko Asaka, le prince Tsuneyoshi Takeda, le prince Naruhiko Higashikuni et le prince Hiroyasu Fushimi, furent exonérés de poursuites criminelles par Douglas MacArthur. Plusieurs historiens critiquent cette décision. Selon John Dower, même les activistes japonais qui ont endossé les chartes de Nuremberg et de Tokyo, et qui ont travaillé à documenter et à publiciser les atrocités du régime shôwa, ne peuvent défendre la décision américaine d'exonérer l'empereur de sa responsabilité pour la guerre et ensuite, au sommet de la guerre froide, de libérer puis de se lier à des criminels de guerre d'extrême-droite accusés comme le futur premier ministre Nobusuke Kishi. Pour Herbert Bix, les mesures vraiment extraordinaires prises par Mac Arthur pour sauver Hirohito d'un procès comme criminel de guerre eurent un impact persistant et profondément distordant quant à la compréhension des japonais à l'égard de la guerre perdue.

Une immunité totale fut également accordée à Shiro Ishii et à tous les membres de ses unités de recherche bactériologiques par Douglas MacArthur.

Autres procès

Outre les procès de Tokyo, d’autres poursuites pour crimes de guerre furent également menées à charge de personnel japonais dans de nombreuses autres villes en Asie et dans le Pacifique entre 1945 et 1951. Environ 5 600 Japonais furent poursuivis dans plus de 2 200 procès. Les juges présidant les tribunaux venaient des États-Unis, de Chine, du Royaume-Uni, d’Australie, des Pays-Bas, de France, d’Union soviétique, de Nouvelle-Zélande, d’Inde et des Philippines. Plus de 4 400 Japonais furent déclarés coupables et environ un millier d’entre eux furent condamnés à la peine capitale. Le procès ayant concerné le plus grand nombre d’accusés fut celui concernant 93 Japonais accusés de l’exécution sommaire de plus de 300 PG alliés dans le massacre de Laha consécutif à la bataille d’Ambon.

Excuses officielles

Le gouvernement japonais considère qu’il convient d’opérer une distinction entre le point de vue juridique et le point de vue moral. Par conséquent, tout en soutenant que le Japon n’a pas violé le droit international ni aucun traité, les gouvernements japonais ont officiellement reconnu les souffrances causées par l’armée japonaise et de nombreuses excuses ont été présentées par le gouvernement japonais. Par exemple, le premier ministre Tomiichi Murayama a déclaré en août 1995 que le Japon « par sa domination et son agression coloniale, a provoqué de terribles dommages et souffrance pour les peuples de nombreux pays, en particulier pour ceux de nations asiatiques », et il a exprimé son « sentiment de profond remords et présenté ses sincères excuses. De même, le 29 septembre 1972, le premier ministre japonais Kakuei Tanaka avait déclaré que la patrie japonaise est intensément consciente du grave dommage que le Japon a causé par le passé au peuple chinois par la guerre et se le reproche vivement ».

Toutefois, les excuses officielles sont souvent considérées comme insuffisantes par de nombreux survivants de ces crimes et/ou par les familles des victimes décédées. La question des excuses officielles est controversée car de nombreuses personnes affligées par les crimes de guerre japonais soutiennent qu’aucune excuse n’a été présentée pour des actes précis et/ou que le gouvernement japonais s’est borné à exprimer des regrets ou du remords. Certains prétendent que dans certains pays les médias travestissent ou cachent les efforts de réconciliation consentis par le Japon, malgré les aides généreuses du Japon, particulièrement dans les pays où les médias sont sous contrôle étatique qu’il soit formel ou seulement factuel. On prétend en outre que ceci reflète un sentiment anti-japonais.

Au Japon, certains ont affirmé que ce qui est demandé est que le premier ministre japonais et/ou l’empereur se livre à la dogeza, au cours de laquelle une personne s’agenouille et incline sa tête vers le sol – une façon très formelle de présenter ses excuses dans les sociétés est-asiatiques à laquelle le Japon ne semble pas vouloir se prêter. Certains citent l’exemple du chancelier Willy Brandt, qui s’agenouilla devant le monument aux victimes du Ghetto de Varsovie en 1970, comme un exemple d’un acte d’excuse et de réconciliation fort et efficace, bien que tout le monde ne soit pas d’accord.

Citant l’acte de Brandt en exemple, John Borneman, professeur d’anthropologie à Cornelldéclare que une excuse représente un échange non matériel ou purement symbolique par lequel celui qui a commis la faute rabaisse son propre statut en tant que personne. Il ajoute qu’une fois que ce type d’excuse est présenté, la partie lésée doit pardonner et rechercher la réconciliation, sans quoi l’excuse n’a aucun effet. La partie lésée peut rejeter les excuses pour plusieurs raisons, l’une d’elles étant d’éviter la réconciliation parce que, en gardant vivante la mémoire de la blessure, les refus empêchent une affirmation d’humanité mutuelle en instrumentalisant le pouvoir qui s'attache au statut de victime permanente.

Par conséquent, certains font valoir que la réticence d’un pays à accepter les gestes de conciliation posés par le Japon peut être dû au fait que ce pays estime que le Japon ne s’est pas abaissé suffisamment pour présenter des excuses sincères. D’autre part, d’autres disent que ce pays choisit de rejeter la réconciliation en vue de se garantir un statut de victime permanent qui serait une façon d’établir un certain pouvoir sur le Japon.



24/10/2013
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